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Coronavirus : récit de Judith Bérard, technicienne d'intervention en loisir au front

Les Habitations Bordeleau (HB) n’ont qu’un cas de la COVID-19, mais cela n’empêche pas les gestionnaires et les employés, notamment en loisir, de prendre toutes les mesures nécessaires pour que le virus n’entre pas dans ses murs.


Mon invitée d’aujourd’hui, la technicienne en loisir Judith Bérard, trouve difficile de voir ses résidents confinés chez eux. Judith est aux premières lignes d'intervention. Malgré tout, elle garde le sourire et continue de créer des étincelles et des moments de bonheur pour nos aînés : « On fait tout ce qu’on peut! On se démène comme des fous, mais ça vaut la peine! »


Sur l’air de Coton ouaté de Bleu Jeans Bleu : « Hey, t’es tu ben chez HB? » Sur sa page

Facebook, mon invitée s’exclame : «Mets-en! En plus, j’ai un super pouvoir… Je suis capable de faire apparaître un sourire sur le visage des gens, et ces temps-ci, j’avoue que c’est encore plus spécial que d’habitude. »

Comme partout au Québec, les mesures sanitaires ont eu un impact sur le quotidien des Habitations Bordeleau : « Certains employés ont vu leurs heures diminuer. Du côté du loisir, c’est des activités et des spectacles qui ont dû être annulés. Pour les résidents, c’est certain que ça les restreint énormément. Autant on a des résidents qui font de la peinture et qui parlent à leur famille par vidéoconférence à tous les jours, autant il y en a qui vivent seuls, que le moral est vraiment bas et qu’ils ne voient pas le bout de tout ça malheureusement. Dans chaque bâtisse, les secrétaires appellent tout le monde à chaque matin pour voir comment ça va. Ça arrive que des résidents se mettent à pleurer au téléphone. » Les secrétaires prennent en note le nom des personnes qui semblent plus fragiles et les remettent à l’équipe des loisirs : « On va voir ces gens simplement pour aller jaser avec eux, les écouter et les rassurer. »

Judith adapte sa routine de travail et plusieurs de ses activités doivent être repensées afin de répondre aux besoins de tout le monde.


« Une certaine journée, j’ai fait pratiquement que du bingo. Je suis arrivée au bureau à 8h ce matin-là et à partir de 8h30, je n’ai pas arrêté jusqu’à 17h30. On s’occupait de la plus grande bâtisse. Six étages, une trentaine d’appartements par étage et on a fait le bingo pour chaque étage. Ça a l’air de rien, le bingo, mais ce n’est pas si simple! Ça prend du temps, mais les gens sont contents et c’est tant mieux. » La création et la distribution d’affiches pour faire la promotion de l’activité demande de l’énergie. « Aussi, on prévoit un bloc d’une heure par étage, le temps de cogner à toutes les portes, d’inciter les gens à participer, de distribuer le matériel, de caller le bingo, d’aller vérifier si le bingo est bon quand il y en a un. On fait ça à chaque étage. Donc ce n’est pas difficile en soi, mais ça prend du temps. »



Le bingo fait du bien et aide le moral de la majorité des résidents, mais certains sont quand même un peu bougons : « Il y a deux types de personnes. Il y en a qui parlent comme si nous, les employés, on faisait exprès de les mettre en confinement. Il y en a d’autres qui sont tellement reconnaissants et nous remercient pour tout ce qu’on fait.» Judith fait preuve d’empathie à l’égard des plus négatifs: « Je comprends que ça devient long… Ça peut tomber sur les nerfs de ces gens qui sont habitués de faire leurs choses, et pouf!, du jour au lendemain, ils ne peuvent plus faire ce qu’ils veulent. »


La liberté est importante pour les aînés autonomes, qui vivent donc davantage de solitude, d’anxiété et de frustration en raison de la crise actuelle. C’est beaucoup d’investissement de la part des employés pour rassurer les gens et certains trouvent cela ardu : « C’est dur pour les employés parce qu’on a peur pour nos familles autant qu’on a peur d’amener le virus sans le savoir aux résidents. » Judith reconnait du même souffle que les gestionnaires de la résidence ont été visionnaires puisque certaines mesures ont été instaurées avant même d’être exigées par le gouvernement.

Ce qui motive mon invitée au quotidien, c’est d’avoir « la chance d’apporter le bonheur. Je ne suis pas la porteuse de mauvaises nouvelles, je suis davantage la porteuse de lumière ». Un autre élément qui la motive, c’est la qualité de l’équipe de travail dont elle

fait partie pour propager cette lumière aux aînés : « On fait des activités balcon, comme on les appelle. On fait nos exercices en bas, à l’extérieur, et les résidents sont sur leurs balcons et nous imitent. On organise des spectacles mobiles, des artistes se promènent dans un camion et donnent une prestation. Les gens apprécient beaucoup. Ça leur permet de sortir dehors sur leur balcon et d’avoir une certaine animation. Ça les sort de leur routine. La musique rassemble bien des gens. On dirait qu’ils ont découvert qu’ils pouvaient sortir sur leur balcon et de jaser avec leur voisin. Ils sont tout contents de s’envoyer la main! » De plus, des marches supervisées sont organisées régulièrement.

Plusieurs projets sont en gestation. Notamment, Judith filme des capsules d’encouragement. Elle est allée voir des résidents pour enregistrer des petites phrases punchées. Ensuite, un montage sera réalisé et la vidéo sera partagée aux résidents pour les encourager en ces temps durs. Une murale de dessins de résidents, du karaoké dans les corridors et un "lipdub" font aussi partie des idées à être mises en place dans un futur proche.

La direction de l’établissement travaille fort pour avoir un système qui permettrait à l’équipe des loisirs de diffuser des images directement dans les télévisions des résidents. Cela permettrait d’offrir davantage d’activités sans que les personnes aient besoin de sortir de chez elles. Judith mijote une idée de bulletin de nouvelles qui se voudrait informatif et humoristique. Tout est pensé pour que les personnes âgées de cette résidence « se sentent connectées et ne se sentent pas seules ».

Lorsque l’étincelante Judith Bérard et son équipe arriveront à mettre toutes ces idées en place, les résidents auront encore moins de raisons de s’ennuyer!

Dans le prochain texte, je vous amène à l’unité psychiatrique de l’Hôpital Jean-Talon avec la technicienne en loisir, Eliane Vaudry-Houle. Le stress et l’anxiété causés par la pandémie actuelle occasionnent davantage d’agressivité chez les patients. Le loisir devient d’autant plus important qu’il permet de calmer les tensions.


Lire le texte de Eliane Vaudry


Sébastien Tremblay

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